AFBH-Éditions de Beaugies 
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Les Jeudis du Songeur (350)

DE LA DÉMOCRATIE

Conformément au projet annoncé le 6 juin, nous poursuivons ici la publication d’extraits de quelques mots-concepts qui sont expliqués dans le Dictionnaire portatif du Bachelier : 


DÉMO-. Racine d’origine grecque signifiant «peuple», ou « Territoire occupé par le peuple ». Cette racine est présente dans des mots essentiels comme Démagogie, Démiurge, Démocratie, Démographie, Endémie, Épidémie (voir ces mots).

DÉMOCRATIE. n. f. (du grec dêmos, « peuple », et kratos, « pouvoir, gouvernement »). Système politique dans lequel le peuple exerce directement ou indirectement le pouvoir. Et donc, gouvernement du peuple par lui-même. On emploie parfois à ce propos l’expression de «peuple souverain», dont tous les citoyens sont membres.

• La notion de démocratie vient de la Grèce antique. Égalité entre citoyens, participation (directe) au pouvoir, en sont les deux éléments déterminants. Il faut savoir cependant que, même dans l’Antiquité, la démocratie athénienne n’était pas parfaite : seuls y participaient les « citoyens », à l’exclusion des femmes, des esclaves et des « métèques » (les étrangers vivant dans la Cité), ce qui en faisait une démocratie très sélective.

• Le bon fonctionnement d’une démocratie suppose plusieurs conditions, sur lesquelles se sont penchés les penseurs politiques. Sans évoquer tous les problèmes posés par ce régime, on peut au moins en signaler trois essentiels :

La question de la vertu. Le danger de la démocratie est, pour le citoyen, dans la tentation de se croire tout permis sous prétexte qu’il détient le pouvoir, de vouloir tout partager, de ne pas supporter la contrainte de la loi qu’il peut avoir lui-même contribué à établir. Platon, Montesquieu, Tocqueville et d’autres ont analysé ce danger. Pour l’éviter, le citoyen doit recevoir une éducation civique, avoir le sens de l’intérêt général, et donc, savoir accepter le sacrifice ou la limitation d’une partie de ses droits. Il faut en effet que ses concitoyens aient les mêmes droits, jouissent d’une même liberté. Cette qualité est nommée par Montesquieu la vertu. Sans vertu républicaine, fruit de l’éducation, le peuple ne saurait vivre en démocratie.

La question de l’égalité. Partager le pouvoir politique ne peut être qu’un leurre si la situation économique ou sociale d’une république est inégalitaire. Le pouvoir de l’argent peut être sans commune mesure avec le pouvoir du vote. Il faut donc un minimum d’égalité entre les citoyens, un minimum de « démocratie économique » (voir Autogestion) pour qu’une démocratie ne soit pas purement formelle.

La question de la représentation. Quand un groupe est restreint, il peut prendre des décisions en assemblée directe (à travers la discussion et le vote). Quand le groupe augmente en nombre, quand le peuple forme une grande nation, la «volonté populaire» ne peut s’exercer qu’à travers des représentants. La démocratie est alors indirecte. Le peuple ne s’exprime que par hommes politiques interposés. Comme en outre, dans les démocraties modernes, l’évolution technique et économique rend la société très complexe, l’exercice du pouvoir échappe de plus en plus aux citoyens. Les élus, nombreux, les savants experts, les technocrates ou les bureaucrates, chargés de mettre en œuvre la volonté du peuple qu’ils représentent, freinent, déforment ou parfois même dénaturent les désirs profonds des citoyens. Ils disposent souvent en outre de l’influence des médias pour orienter l’opinion publique. La représentativité des gouvernements ou des pouvoirs, dans une démocratie, est donc toujours menacée. Le danger d’abstention, de perte de confiance, de « dépolitisation » des citoyens qui se sentent impuissants, est permanent.

• On peut conclure néanmoins avec Churchill citant un démocrate brésilien : « La démocratie est le pire des régimes, à l’exception de tous les Autres »…Voir les mots Anarchie, Bureaucratie, Citoyen, Démagogie, Égalitarisme, Pouvoir.

Le Songeur  (20-06-2024)



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